jeudi 3 octobre 2013

Marie-Andrée Roberge: la nostalgie comme bagage

C'est sur le tard et dans le cadre d'une réorientation de carrière que Marie-Andrée Roberge a vécu un coup de foudre avec la céramique. De passage dans Charlevoix, elle a pénétré dans les Ateliers Deblois et elle est restée saisie devant les piles de vaisselle artisanale, avec l'atelier juste derrière, puis la belle vue sur le fleuve par la fenêtre. "J'ai réalisé qu'on pouvait avoir cette vie-là, alors j'ai demandé à l'employé qui m'a accueillie: "Comment on fait?""


Le rouleau à pâte est l'un des principaux outils de Marie-Andrée qui
s'en sert pour amincir les galettes d'argile qu'elle utilise dans la composition
de ses œuvres.
Dirigée vers la Maison des Métiers d'art de Québec, Marie-André a été doublement séduite par la perspective d'explorer le domaine de la céramique lorsqu'elle a appris que cette discipline permettait de faire des stages et des résidences à l'étranger. Elle a alors complété une formation en céramique grâce à laquelle elle a commencé à élaborer une gamme d'objets utilitaires et décoratifs. "J'aime l'idée de créer des objets bien faits, sensibles et intégrés à un quotidien."

Une fois son diplôme en poche, la céramiste a continué son processus de recherche et de développement, notamment par le biais de stages et d'expériences de travail qui lui ont permis de trouver une réponse à l'une des énigmes qui se posaient à elle dans sa production: le décor des pièces. Ne pouvant se contenter de l'application de glaçures sur la surface des œuvres, Marie-Andrée s'est enrichie de l'expertise d'autres artistes spécialisés en sérigraphie et en transfert d'images sur argile à l'atelier-boutique Gaïa à Montréal.

"Grâce à ces techniques, le décor semble se fusionner à la pièce. Je peux me permettre d'y aller dans les détails, dans la finesse des traits."

On aperçoit ici des décors en sérigraphie, sur une pièce
qui n'a pas encore été cuite et glacée, une oeuvre en chantier!

Et ici, ce sont des impressions d'oiseaux en vol qui sont mises
en valeur dans l'argile. Cette pièce aussi est en cours d'élaboration.

Ces choix esthétiques n'ont pas tardé à dicter la forme des pièces de Marie-Andrée, qui travaille avec des plaques d'argile, lesquelles sont décorées avant d'être mises en forme ou façonnés de manière à créer bols, tasses, assiettes, vases et autres objets utilitaires ou tout simplement jolis, comme ses adorables biscuits chinois en céramique.



" Je suis encore en train de définir ma démarche artistique, mais chose certaine, il y a des thèmes récurrents dans mon travail. Je suis attirée par la nature, les mots écrits, l'architecture et les carrelages, ce qui est vieux, en général et les oiseaux en particulier. Ce qui est drôle, c'est que la passion des oiseaux appartenait à mon père et que j'étais un peu dépassée par tout ça quand j'étais plus jeune. Disons que s'arrêter sur le bord du chemin pendant une heure pour tenter d'identifier une espèce d'oiseau, c'était pas super!"

Une vieille copie du Peterson, a field guide to birds, la référence
de son père ornithologue, ne quitte jamais l'atelier! 
Pourquoi alors, cette proéminence des oiseaux dans sa production? Parce qu'ils font partie de ses souvenirs, qu'elle représente sous la forme de collages flous, de vignettes superposées, de bribes d'un passé encore significatif. Aussi, parce que délocalisés, les oiseaux et ses autres thèmes ont quelque chose d'universel. "Lorsque j'ai travaillé en Bretagne, on me disait que ça se voyait que j'avais passé du temps là-bas et que je m'étais imprégnée du paysage de bord de mer, alors qu'en fait, il s'agissait d'impressions de chez nous."

De retour depuis peu après une résidence artistique de cinq mois à Bruxelles, Marie-Andrée entend poursuivre son travail de création et continuer de voyager avec une nouvelle résidence - en Irlande cette fois - à compter de novembre. "Lorsque j'arrive dans un nouvel endroit, j'aime toujours voir ce que ça amène sur le plan créatif."

Dans un parcours marqué par les petits déracinements, l'esthétique nostalgique de Marie-Andrée prend un tout autre sens. Où qu'elle aille, elle n'est jamais vraiment seule, puisqu'elle porte ses souvenirs et son héritage en bagage.



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