Aujourd'hui, j'ai décidé de vous mitonner un billet condensé en 5 points sur l'art de l'assaisonnement, ou plus précisément, comme balancer les saveurs d'un plat. En maîtrisant quelques notions de base très simples, je suis convaincue d'être capable de vous aider à atteindre le prochain niveau dans votre cuisine. On y va?
1. Goûter, goûter, goûter?
Ais-je mentionné que vous deviez goûter vos plats? Vous entendez cet énoncé à répétition dans les émissions de cuisine et pour cause: même si on croit avoir une bonne image mentale d'un plat dans notre tête, la réalité peut être tout autre.
Ça vous surprend? De nombreux produits utilisés en cuisine varient en acidité, en amertume, en sucre ou en degré d'épices selon la saison. Dans un monde idéal, il faudrait même goûter aux ingrédients AVANT de les incorporer à la recette, de manière à prévenir les faux pas. Ceci est particulièrement vrai du piment, car contrairement à d'autres "défauts" qui peuvent se glisser dans vos créations mais être corrigés par le bon antidote, il n'y a aucune autre manière d'atténuer l'intensité pimentée d'un plat sinon la dilution avec du liquide, et c'est loin d'être toujours possible si vous voulez préserver les autres saveurs.
2. Trianguler les saveurs
Ne cherchez pas ce terme sur Internet, c'est une notion que j'ai plus ou moins inventée. J'ai remarqué que la plupart des plats qui nous stimulent et nous satisfont sur le plan gustatif présentent une même caractéristique: à un niveau ou à un autre, ils présentent (au moins) 3 expériences gustatives: salé, sucré, amer, épicé (par le piment, bien entendu, mais le poivre joue aussi cette fonction), acidulé. herbacé ou umami. Un plat qui ne serait que salé, par exemple, risquerait fort de sembler plat, tandis qu'un plat uniquement sucré tombe vite sur le cœur. (En passant, les desserts sont une exception notable au principe de triangulation. Ici, on s'en sort bien dès qu'il y a deux expériences gustatives en jeu.)
Si un plat comporte une forte dominante, il faut alors mieux prévoir des accompagnements qui la modéreront et la rendront plus agréable. Cela invite à bien réfléchir à la composition du plat. Parfois, les expériences gustatives viennent des ingrédients eux-mêmes (ex: l'acidité de la tomate, l'amertume de l'aubergine, l'umami du champignon). Parfois, ce sont les assaisonnements qui jouent ce rôle. Les ingrédients et les assaisonnements travaillent en harmonie pour stimuler le goût et l'odorat.
3. Connaître et appliquer les antidotes
Cette règle représente la synthèse de ma formation culinaire. Mes instructeurs n'ont jamais utilisé ces mots, mais au fil des jours et des catastrophes en cuisine (les étudiants n'ont pas toujours les meilleurs réflexes!), j'en ai déduit des principes très importants. Plusieurs saveurs peuvent être rééquilibrées en recourant à une saveur miroir, baptisée ici "antidote." Ainsi, même lorsqu'un plat semble trop sucré ou trop amer, la bataille n'est pas nécessairement perdue si on sait comment ça marche.
Trop sucré? - Le sel et l'acidité (ex: agrumes, vinaigre) sont deux antidotes. Le sel fonctionne bien dans les applications salées, et l'acidité, dans les applications sucrées, mais il faut explorer un peu par soi-même afin de développer une compréhension plus instinctive de ce système.
Trop salé? - Évidemment, le sucre (sucre blanc, miel, sirop d'érable, cassonade) est ici un remède, mais pas l'acidité en revanche! Le choix du bon sucre est important, car à part pour le sucre blanc, tous les autres sucres ont un goût qui leur est propre et qui peut créer une discordance avec les autres saveurs dans le plat. À l'inverse, en étant conscient de ces propriétés, vous pouvez "ajouter" une note aromatique à votre plat en osant autre chose que le sucre blanc. Comme un surplus marqué de piment, un surplus marqué de sel est une erreur difficile à corriger, car le sucre a ses limites comme antidote.
Trop amer? - Le sucre est aussi l'antidote de l'amertume. Je ne vous apprend sans doute rien, mais c'est pour cette raison que plusieurs personnes en mettent dans leur café! Dans une moindre mesure, l'acidité permet aussi de créer une "distraction", d'ailleurs fort plaisante dans le combo endives et orange, par exemple.
Trop acidulé? - Pas trop de surprise ici, l'antidote est le sucre, mais on oublie parfois que c'est vrai pour autre chose que la limonade. Les sauces tomates, par exemple, sont souvent un brin trop acides, ce qu'une très petite quantité de sucre blanc aurait pu résoudre.
3. Faire de la magie avec une pincée de sucre
Un de mes meilleurs secrets de chef, la touche Foodista en mission, si vous voulez: incorporer une pincée de sucre à votre routine d'assaisonnement à la fin d'un plat. En trop petite quantité pour envoyer le message "sucré" aux papilles de vos goûteurs, il permet d'ajouter discrètement une "troisième" dimension à un plat en un tour de main.
4. Saler, sucrer, saler
Ce principe découle de tous les principes précédents. Le sucre étant l'antidote du sel et le sel, l'antidote du sucre, je vous devine tentés de vous insurger! Est-ce à dire qu'on fait tout ça pour rien? Les antidotes agissent sur la perception des papilles gustatives, en leur procurant une distraction, mais le fait est qu'ajouter un peu de sucre ne rend pas un plat moins salé. Par contre, cela permet de dissimuler la présence de sel pour le sens du goût, et en salant légèrement par-dessus ce sucre une dernière fois (il est bien important de goûter à chaque étape!), vous pouvez offrir une intensité gustative très décadente à vos goûteurs.
Je n'applique ce principe que lorsque je cuisine professionnellement, car dans la vie de tous les jours, forcer sur le niveau de sel nuit à la santé et crée une habituation du palais à des niveaux de sel toujours plus élevé, un problème qu'on retrouve chez de nombreux chefs en fin de carrière.
5. Bien choisir ses assaisonnements
J'imagine que cela va de soi, mais il est facile d'oublier de prêter la même attention aux aromates qu'on utilise en cuisine que celle qu'on accorde au choix des ingrédients principaux.
Il existe plusieurs variétés de sels et aussi surprenant que cela puisse paraître, elles n'ont pas toutes le même goût. Certains sels sont plus légers, d'autre plus intenses, d'autres encore, aromatisés. Pour les grandes quantités, j'utilise toujours du sel blanc de table, mais pour assaisonner un plat, de préfère le sel rose d'Himalaya, la fleur de sel de Guérande ou la fleur de sel fumée de Maldon.
Du côté du poivre, les options abondent également. Évitez si vous le pouvez le poivre noir déjà moulu, car il perd de sa fragrance, et ayez à votre disposition un, voire plusieurs moulins à poivre.
Les épices et fines herbes séchées représentent parfois une bonne alternative aux produits frais, mais il faut explorer afin d'apprendre à choisir ce qui est le plus approprié. (Un autre projet d'article?) Idéalement, achetez-les entiers plutôt que moulus. Vous pourrez ensuite décider du traitement que vous leur réservez (ex: faire rôtir des graines de cumin avant de le réduire en poudre avec un moulin à épices.) Conservez-les dans des contenants hermétiques à l'abris de l'humidité et achetez de petites quantités à la fois. Après quelques mois, elles perdent une partie de leurs propriétés aromatiques!
En conclusion
Personne n'est "foncièrement" mauvais en cuisine, par contre, il y a plusieurs personnes qui ne sont pas familières avec les bases, car elles n'ont jamais eu l'opportunité d'apprendre. Avec ces quelques notions en tête, un cuisinier du dimanche peut faire aussi bien que le resto du coin... à condition de ne pas brûler la sauce dans le fond de la casserole!
Edit- 02/09/19 Si vous vous êtes rendus jusqu'ici, c'est que vous avez un intérêt marqué pour les saveurs! Sachez que j'ai maintenant un nouveau blogue, La Touche Héloïse, qui est entièrement dédié à ma passion pour les saveurs. J'y présente une foule d'astuces ainsi que mon offre en ateliers gourmands. Au plaisir de vous y retrouver!
Edit- 02/09/19 Si vous vous êtes rendus jusqu'ici, c'est que vous avez un intérêt marqué pour les saveurs! Sachez que j'ai maintenant un nouveau blogue, La Touche Héloïse, qui est entièrement dédié à ma passion pour les saveurs. J'y présente une foule d'astuces ainsi que mon offre en ateliers gourmands. Au plaisir de vous y retrouver!
Merci pour cet article - très intéressant. Perso, j'adore cuisiner - pour le plaisir - mais je sens que j'ai toujours du mal à la toute fin du plat, pour balancer les saveurs. Cet article, et beaucoup plus de pratique, sont un pas en avant! :)
RépondreEffacerBonjour Marie-Line! Votre commentaire me comble de joie!! Si vous rencontrez d'autres blocages en cuisine, faites-moi signe! Il me fera plaisir de vous mitonner quelques pistes de solution! :) - Héloïse
EffacerSuper très bon texte
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